20 janvier 2013

On travaille tous gratuitement pour Google

Une mission gouvernementale a rendu un rapport envisageant de taxer Google, Facebook et consort, selon le volume de données personnelles qu'ils collectent et exploitent. Et le projet apparaît d'autant plus juste, que par le simple fait d’être présent en ligne, on travaille et crée de la valeur pour ces entreprises, c’est le Digital Labor. Explications.

A l’origine de ce rapport rendu ce vendredi, le gouvernement qui a confié à Pierre Collin, conseiller d'Etat, et à Nicolas Colin, inspecteur des Finances, le soin de trouver des idées pour taxer les groupes internationaux qui "éludent ou minorent" leur imposition en France, tels Google, Apple, Facebook et Amazon. Le rapport prend un biais. Il propose de taxer ces entreprises selon le volume des données personnelles des Français qu’elles exploitent, en tant que ces données seraient représentatives d’un volume d’activité économique échappant à l'impôt sur le territoire. C’est assez vrai, mais un autre argument plaide pour cette taxe.

Notre participation en ligne est en fait une forme de travail. Qui en tant que tel, pourrait être rémunéré, ou au moins taxé pour permettre la redistribution de la valeur créée. Car notre simple présence en ligne génère de la valeur : toutes les activités de publication (blog, commentaires, partage sur les réseaux sociaux), le ciblage marketing, l’exploitation de données personnelles (Data mining) et même le simple fait de cliquer sur un lien crée de la valeur…


On estime globalement que la richesse créée par un internaute moyen, qui navigue sur Internet via des moteurs de recherche et des réseaux sociaux rapporte entre 20 et 30 euros par mois aux propriétaires de plateformes, tout en participant à améliorer leur outil. C’est ce qu’un chercheur, Trebor Scholz, appelle le Digital Labor.

Le Web 2.0, dit participatif (réseaux sociaux, commentaires, blogs, Agora…) a rendu le web dépendant des moteurs de recherche. L’algorithme de Google est devenu un des principaux pivots de l'économie d’internet. Et cet algoritme est globalement basé sur les avis et le comportement de ses propres utilisateurs, c'est à dire leurs données personnelles. Des avis eux-mêmes pondérés : une visite n’a pas la valeur d’un « like » Facebook, d’un partage de lien ou d’un commentaire. Google donne de la valeur à une page en la référençant mieux, ce qui crée à son tour de la valeur, par le trafic généré et par la publicité.

Donc qu’on le veuille on non, on « travaille » dès qu’on se connecte sur le Web. Les 40 000 utilisateurs de Google par seconde travaillent pour Google, améliorent le moteur de recherche. Et les seuls à qui ce travail rapporte c’est Google et ses actionnaires. Ce qui explique pourquoi Google a un nombre si ridicule de salariés rémunérés comparé à la valeur produite, et pourquoi l’entreprise est si rentable : près de 200 milliards de capitalisation boursière pour 50 000 employés. A comparer avec Renault par exemple : 12,3 milliards en valeur pour 122 000 salariés.


l'Humanité

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